Lettre d’un ami à un ami n° 44
Bien à toi, cher lecteur,
Me voici au cœur de ma retraite annuelle et je désire te communiquer, à toi que je ne connais pas, les sensations et découvertes que j’ai la chance de vivre intensément durant ces exercices de st. Ignace avec les moines de l’abbaye st. Joseph de Clairval (Flavigny en Côte-d’Or).
En ce quatrième jour de vie intime avec Jésus, je viens de contempler sa condamnation du jour, juste après L’avoir sorti du cachot où Il avait passé les quelques heures faisant suite à l’illégale condamnation des tribunaux de la nuit.
Notre Seigneur fut traîné devant Pilate qui, après L’avoir interrogé brièvement, ne vit aucun motif apparent de culpabilité malgré l’insistance des juifs qui étaient à la base de son arrestation.
Déjà ici, nous pouvons nous étonner, si nous sommes sincères, du nombre considérable de situations vécues dans notre propre vie durant lesquelles nous L’avons tenu responsable de tout ce qui ne tournait pas rond dans le monde ou d’être reconnu coauteur des revers de fortune éprouvés ! En cela, je L’ai moi-même amené à Pilate.
Quand ce dernier apprit son origine (Galiléen), espérant se débarrasser de l’affaire, c’est vers Hérode, tétrarque de Galilée, qu’Il fut alors emmené brutalement ; et là, assailli de questions devant l’infâme personne qui attendait de Lui quelques miracles pour le distraire, Notre Sauveur se tut. Quel ne fut pas le dépit de ce chef sanguinaire qui le prit pour fou et le revêtit de pourpre en conséquence !
A ce stade, je me rends compte combien se taire devant les injures et les injustices peut engendrer chez nous, d’une part un renforcement de notre patience et d’autre part une solution déstabilisante pour l’adversaire. J’en prendrai bonne résolution pour mon avenir en demandant bien sûr la grâce de Dieu.
Ainsi malmené à nouveau vers Pilate qui devient pour Hérode ami de circonstance, notre Jésus subit alors un nouvel interrogatoire : Es-tu le roi des Juifs ? Je le suis. Ignores-tu que j’ai le pouvoir de te condamner ? Tu n’aurais aucun pouvoir si tu ne le recevais de mon Père qui est aux Cieux.
Très embarrassé, Pilate se souvint de cette loi permettant la libération d’un prisonnier à l’occasion de la Pâque et sauta sur l’occasion pour proposer au peuple Barrabas, un bandit détesté ; ainsi Jésus serait libéré ! Mais c’était sans compter sur la méchanceté des scribes et des pharisiens qui, effrontément, s’arrangèrent pour que tous crient « libérez Barrabas ! » et contre Jésus « Crucifie-Le, crucifie-Le ! »
Quant à moi, je suis peu fier d’avoir si souvent désobéi aux divins commandements, véritables cadeaux offerts pour notre Salut. Ainsi, mes agissements peccamineux ont progressivement renforcé certaines habitudes égoïstes qui dessinaient en silence la sentence contraire à la Vérité. Sans le vouloir vraiment, j’étais donc dans la foule criant le scandale. Je suis donc responsable moi aussi car évitant son regard, ne voulant pas L’entendre, je lui crachais au visage ! Et Lui, transperçant son chagrin me lançait son regard miséricordieux …
Dans son chemin vers le Golgotha, j’ai vu Simon de Sirène qui me proposa de le remplacer. Comme il était lourd ce bout de croix à soulever mais en emboitant le pas du condamné, petit à petit, je sentis mon désarroi se transformer en compassion ; plus on approchait de la destination, plus mon cœur rougissait de honte d’avoir douté de Lui et il fallut attendre les sanglots libérateurs pour atteindre la paix de l’âme.
(Et voici que je vous offre la petite patte du “p’tit lynx” de mon fils pour vous emmener gentiment dans la découverte suivante ; prenez-la encore quelques minutes …)
Je désire à présent vous faire part d’une prière qui vient de m’être suscitée par l’Esprit Saint lors de ma dernière méditation ; je vais tâcher de vous en faire bénéficier maintenant, mais cela ne marchera qu’à la seule condition que vous unissiez votre prière à la mienne.
Confiance … et vous en ressentirez les effets si vous êtes sincère dans votre oraison. J’avais comme base l’Evangile de st. Jean 11 (17 à 44) :
Lorsque Jésus trouva Lazare au tombeau et que Marthe, sa sœur reprocha au Maître son absence au moment des faits (son décès 4 jours avant), adressons à Jésus, présent à notre écoute, notre prière avec elle en disant : « Oui, Jésus, maintenant encore, malgré ma mort spirituelle due à tant de péchés commis dans mon passé, je sais que tout ce que Tu demanderas à Dieu, Dieu te le donnera ». Autrement dit : « J’ai pleine confiance en ton action (re)créatrice, ô mon Seigneur, et je sais que Tu peux tout ressusciter en moi afin que je devienne ton image, ta ressemblance ! Comme tu es bon, mon Jésus, de susciter en mon âme une telle confiance. Je T’aime. Et je Te l’avoue, je commence à T’aimer … plus que ma vie ! Merci ! »
Et de suite, nous savourons la réponse qui fuse : « Ton frère ressuscitera ! Je suis la Résurrection et la Vie ! Celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra ! Et quiconque vit et croit en moi, ne mourra jamais !» Quelle joie profonde ne doit-elle pas nous animer dès lors que nous entendons ensuite : « Lazare, sors ! »
Nous sommes alors sûrs d’être déliés définitivement de nos chaînes, mes bien chers frères et sœurs, et c’est avec une confiante allégresse qu’il ne nous reste plus qu’à courir au tribunal de Dieu (confessionnal) où le prêtre, instrument divin et assermenté se fera aussi une joie de nous accorder au vu de notre sincère repentir, l’absolution libératrice, source de tant de nouvelles grâces …
Merci pour ces quelques pas que nous avons osé faire ensemble pour le bien de tous !
A bientôt.
Jean-Michel Moulart