Dieu, la Sainte Trinité
2ème partie
Par Sœur Marie Lataste, mystique catholique
Partie 1
Chap. 8, Le ciel est à Dieu ; il a donné la terre aux enfants des hommes : « La terre est insuffisante pour l’homme. »
— Le ciel des cieux est pour le Seigneur, me dit un jour le Seigneur Jésus ; mais il a donné la terre aux enfants des hommes.
« Dieu a fait le ciel et la terre ; le ciel que vous voyez au-dessus de votre tête, la terre que vous foulez sous vos pas. Dieu a fait le ciel qui porte aux hommes la lumière pour le travail du jour, et les ténèbres pour le repos de la nuit; il a fait aussi la terre qui leur donne la nourriture du corps et les vêtements pour le couvrir; et ainsi le ciel et la terre que Dieu a faits et qui appartiennent à Dieu, sont pour l’homme; et quand la terre disparaîtra pour l’homme, un nouveau ciel lui apparaîtra pour le recevoir; non plus un ciel matériel, dans lequel se font le jour et la nuit, la lumière et les ténèbres, le calme et la tempête, mais un ciel spirituel, un ciel tout plein de Dieu, un ciel qui montre à découvert Dieu et sa gloire, qui permet à l’homme de le voir, de le contempler, de le comprendre; de le voir assez pour n’avoir pas besoin d’autre lumière, de le contempler assez pour ne désirer pas d’autre satisfaction, de le comprendre assez pour que son intelligence trouve en Dieu son repos. Voilà le ciel qui est aussi pour l’homme le ciel que Dieu veut lui donner, comme il lui a donné la terre, le ciel dont il veut le faire sujet, comme il l’a fait sujet de la terre, le ciel qui sera la félicité suprême que l’homme cherche vainement sur la terre.
« Ce ciel appartient à Dieu ; il est la résidence particulière de Dieu, le lieu de sa manifestation aux créatures, le trône de sa majesté et de sa gloire : voilà pourquoi il est dit que le ciel est à Dieu et la terre pour les enfants des hommes. Le ciel est le temple de Dieu, comme la terre est le temple de l’homme ; le ciel est le lieu de la glorification éternelle de Dieu, comme la terre celui de la glorification éternelle de Dieu, comme la terre celui de la glorification temporelle de l’homme. Dieu est roi du ciel, l’homme roi de la terre. Dieu pourtant n’a reçu le ciel de personne, mais l’homme a reçu la terre de Dieu. La terre n’est point donnée à l’homme à perpétuité, parce que la terre est insuffisante pour l’homme.
L’homme n’est pas seulement terrestre, il est aussi céleste. L’homme a été d’abord fait de terre, puis un souffle céleste lui a donné la vie. Le ciel est descendu sur cette terre, chair de l’homme, pour la prendre et l’élever au ciel. La terre n’est que le marchepied sur lequel l’homme prend position pour s’élever au ciel. La terre, c’est un lieu élevé d’où l’homme prend son élan vers le ciel. La terre, c’est une haute montagne que l’homme gravit et dont le sommet permet à l’homme d’entrer au ciel. La terre, c’est un arc bandé fortement vers le ciel et dans lequel l’homme doit se placer pour être envoyé au ciel. La terre n’a été donnée à l’homme que pour le mettre à même de posséder un jour le ciel, qui est à Dieu. C’est Dieu qui a donné la terre aux enfants des hommes, c’est Dieu qui veut aussi leur donner le ciel.
« Mais voyez les hommes : ils montent sur le marchepied de la terre, non pour s’élever au ciel, mais pour se précipiter dans l’abîme ; ils gravissent le lieu élevé et cette haute montagne, qu’elle figure, non pour gagner le ciel, mais pour tomber plus sûrement dans les ténèbres éternelles ; ils se placent sur l’arc bandé vers le ciel, mais ils détournent la direction de cet arc dans le sens opposé, comme pour montrer qu’ils ne veulent point du ciel et qu’ils sont tout à la terre. Malheureux ! Dieu est le tout de l’homme et la terre n’est rien pour eux, et ils disent à la terre : Vous êtes tout pour nous ; ils disent à Dieu : Pour nous, Seigneur, vous n’êtes rien, laissez-nous à la terre.
« N’agissez-vous point ainsi, jeunes hommes et jeunes filles ? Au lieu de vous rappeler que vous êtes faits pour le ciel, au lieu de consacrer à Dieu le printemps de vos années, au lieu de lui faire abandon de tout ce qui vous appartient, au lieu de vous avancer de plus en plus dans le chemin de la vertu, au lieu de vous rapprocher du ciel, vous ne désirez que la terre ; eh bien ! Vous ne recevrez pas autre chose, et la terre se changera pour vous en un supplice éternel.
« N’est-ce point ainsi que vous agissez, pères et mères, cherchant à accroître le domaine de vos enfants, à leur acquérir de plus grandes richesses, à les attacher de plus en plus à la terre. Au lieu de les attacher de plus en plus au ciel, au lieu d’augmenter et d’accroître leurs vertus, ces trésors que la rouille et les voleurs ne peuvent faire disparaître, vous ne désirez pour vous et pour eux que la terre ; eh bien ! Vous ne recevrez pas autre chose, et la terre se changera pour vous en un supplice éternel.
« N’est-ce point ainsi que vous agissez, hommes d’affaires et de négoce, qui n’avez qu’une probité apparente, qu’une justice fausse et mensongère, qu’une prudence fondée sur l’or et sur l’argent ? Au lieu de vous rappeler le travail seul nécessaire, qui doit vous donner les trésors du ciel, vous ne désirez que la terre ; eh bien ! Vous ne recevrez pas autre chose, et la terre se changera pour vous en un supplice éternel.
« N’est-ce pas ainsi que vous agissez, magistrats, juges, ministres et potentats ? vous êtes l’image du gouvernement de Dieu, l’image des jugements de Dieu, l’image de la puissance de Dieu, et vous l’oubliez pour agir comme si vous deviez à jamais administrer la terre, à jamais juger la terre, à jamais commander à la terre; eh bien! Vous ne recevrez pas autre chose, et la terre pour vous se changera en un supplice éternel.
« Je vous le dis, ma fille, avec toute la force de la vérité qui demeure éternellement, les hommes se flattent en vain de pouvoir continuer avec impunité et leurs injustices, et leurs rapines, et leurs trahisons, et leurs iniquités qui croissent chaque jour de plus en plus. Ils se trompent en pensant que Dieu, qui ne se venge pas sur la terre, ne se vengera jamais. Qu’ils avancent encore, qu’ils marchent toujours ; ils avanceront et marcheront vers l’éternelle justice de Dieu, à laquelle nul, ne pourra échapper. Quand viendra l’heure de la justice, Dieu mettra sous les yeux de chaque homme en particulier toutes ses actions, et alors tous recevront la terre qu’ils auront cherchée.
« Cette terre matérielle disparaîtra pour eux ; l’enfer sera la terre nouvelle et éternelle que Dieu donnera aux réprouvés. Le ciel sera la terre nouvelle et éternelle que Dieu donnera aux réprouvées. Le ciel sera la terre nouvelle et éternelle que Dieu donnera aux élus. La terre de l’humanité sera la possession ou la privation de Dieu : Dieu avec les hommes, Dieu loin des hommes.
« O ma fille, pensez toujours à la nouvelle terre que vous devez habiter un jour, pensez au ciel que Dieu veut vous donner, à cette terre où Dieu habite, où Dieu se manifeste, où Dieu se donne, où Dieu se livre à ses élus. Fuyez au contraire toujours la terre où Dieu n’habite que par sa justice et ses vengeances, ne se manifeste, ne se donne, ne se livre aux réprouvés que comme Dieu vengeur et souverainement juste. »
Chap. 9, Le ciel de Dieu c’est Dieu
Le ciel qui sera donné aux élus est un ciel créé
Après ces paroles, le Sauveur Jésus ajouta :
— Vous comprenez, ma fille, comment l’homme trouvera ce qu’il cherche dans la terre que Dieu lui a donnée ; vous voyez quelle bonté Dieu témoigne à l’homme de vouloir lui donner une place dans le ciel, qui est à Dieu. Je veux vous faire remarquer une chose à laquelle vous n’aviez point pensé.
« Le ciel est le lieu de la récompense des justes ; il est à Dieu, et Dieu le donne à ses élus. Mais il est un ciel supérieur à celui que Dieu donnera à l’homme, un ciel qui s’appelle avec vérité et qui est véritablement le ciel du ciel, c’est-à-dire le ciel de Dieu, le ciel qui appartient à Dieu. Ce ciel, c’est le sein de Dieu dans lequel le Saint-Esprit unit le Père et le Verbe ; ce ciel, c’est Dieu même. Ce ciel n’est pas comme celui qui sera donné aux élus, un ciel créé ; c’est un ciel incréé, qui n’a jamais eu de commencement et n’aura jamais de fin, qui existait avant l’origine des choses, qui existera toujours. Ce ciel était en Dieu, ce ciel était Dieu. C’est le ciel du ciel ; c’est le bien éternel en lui-même, la félicité éternelle en elle-même, la toute-puissance, la souveraine sagesse, la souveraine perfection, Dieu. »
Chap. 10, « Dieu est un médecin qui tue pour vivifier et frappe pour guérir. »
Voici ce que m’a dit un jour le Sauveur :
— L’homme sur la terre ressemble à un corps qui n’a plus de vie, ou à un malade qui a besoin de recouvrer la santé. Dieu dans le ciel est pour l’homme un médecin qui tue pour vivifier, qui frappe pour guérir. Écoutez le sens de ces paroles.
« L’homme ressemble à un corps sans vie. Quelle est la vie de l’homme après celle de l’union de l’âme avec le corps ? C’est la contemplation de la vérité, la marche dans la voie de la vérité, la demeure dans la vérité. L’homme a-t-il la vérité ? Non, il l’a perdue par le péché, par sa révolte contre Dieu, et il lui était impossible de la retrouver jamais, et sans la vérité, l’homme est semblable à un corps sans vie.
« L’homme est semblable à un malade. En quoi consiste la santé de l’homme, après la proportion dans ses membres et la force adhérente à chacun de ses membres ? Elle consiste dans la rectitude et le facile exercice de ses facultés. L’homme a-t-il la rectitude dans ses facultés ? a-t-il un facile exercice de ses facultés ? Non, l’homme a été blessé jusque dans le plus intime de son être intellectuel et moral par le péché. La rectitude n’est plus en lui ; ses facultés ne suivent plus la ligne droite. Il a l’exercice de ses facultés, mais c’est un exercice plein de labeur et qui n’est point conforme à la sagesse. L’homme est donc un malade qui a besoin de recouvrer la santé.
« Un principe de vie sera donné à ce mort, ce sera le Fils de Dieu fait homme, et ce mort reviendra à la vie. Un remède plein d’efficacité sera donné à ce malade, ce sera le sang du Fils de Dieu fait homme, et ce malade recouvrera la santé.
« Le médecin de l’homme, qui possède l’existence et qui cependant est mort, qui possède la santé et qui cependant est malade, ce médecin, c’est Dieu. Or, Dieu tuera cet homme pour le vivifier ; il le frappera pour le guérir.
« Vous allez comprendre, ma fille, et vous adorerez l’œuvre et les desseins bien admirables de la Providence.
« Dieu est un médecin qui tue pour vivifier. Quelle est la vie de l’homme ? La vie de l’homme est une vie dans le péché, dans le crime, dans l’injustice, dans l’impiété ; vie dans la fornication, vie dans le vol, vie dans les meurtres, vie dans l’oppression du faible, vie dans le parjure, vie dans le blasphème, vie dans la révolte contre Dieu. Dieu s’approche de cet homme, tue en lui l’homme de l’iniquité et lui donne la vie de la justice ; il tue cet homme à la concupiscence du mal et le fait vivre dans l’amour des vertus ; il tue l’homme adultère et impie pour faire vivre l’homme chaste et vertueux. Telle est l’œuvre par excellence de Dieu sur l’homme.
« Dieu est un médecin qui frappe pour guérir. Il frappe les hommes par ses commandements pour les guérir de leurs vices ; il les frappe par ses menaces pour les guérir de leurs révoltes ; il les frappe par la vue de l’enfer pour tourner leurs regards vers le ciel ; il les frappe en leur découvrant les artifices de Satan pour leur faire observer les œuvres de sa divine miséricorde.
« Acceptez, ma fille, le principe de vie qui vous sera donné par mon Père ; acceptez le remède qu’il vous offrira. Je ne vivifie que ceux qui veulent être vivifiés, je ne guéris que ceux qui veulent être guéris ; mais la guérison que j’opère n’est pas une guérison passagère, elle est pleine d’efficacité et conserve la santé à jamais ; et la vie que je rends n’est pas une vie d’un jour, c’est une vie qui mène à l’éternité de la vie.
« Celui qui refusera la vie que je veux lui donner, restera éternellement dans la mort ; et celui qui refusera la santé que je veux lui rendre, l’aura perdue pour l’éternité. »