ASDE 05 : Le culte de l’Eucharistie

Le culte de l’Eucharistie

Prédication de Saint Pierre Julien-Eymard

J’ai aimé la beauté de votre maison (Ps 25, 8)

 

Un jour une femme, une bonne adoratrice celle-là, vint à Jésus pour adorer. Elle apportait avec elle un vase d’albâtre rempli de parfums qu’elle répandit sur les pieds de Jésus, pour lui témoigner son amour et honorer sa divinité et son humanité sainte. « Pourquoi cette profusion ? dit le traître Judas. Ces parfums auraient pu se vendre très cher, et on aurait donné le prix aux pauvres ». Mais Jésus venge sa servante : « Ce que cette femme a fait, elle l’a bien fait. Et partout où sera prêché cet Evangile, on racontera cette action à sa louange) (Jn 12, 5). (Dans l’une de ses homélies le Père Miche-Marie Zanotti-Sorkine nous précise que la valeur de ce parfum représentait le salaire d’une personne pour une année.)

Voici l’application de ce fait évangélique.

 

Notre Seigneur est au Saint-Sacrement pour recevoir des hommes les mêmes hommages qu’il reçut de ceux qui eurent le bonheur de l’approcher durant sa vie mortelle. Il est là, afin que tout le monde puisse rendre à son humanité sainte des hommages personnels.

 

Quand ce serait la seule raison de l’Eucharistie, nous devrions être bien heureux de pouvoir rendre à Notre-Seigneur en personne nos devoirs de chrétiens. Par cette prédication, le culte public a une raison d’être une vie. Otez la présence réelle, comment rendrez-vous à sa très sainte humanité les respects et les honneurs auxquels elle a droit ? Notre Seigneur, comme homme, n’est qu’au ciel et au Très-Saint Sacrement. C’est par l’Eucharistie que nous pouvons approcher du Sauveur en personne, vivant, le voir, lui causer. Sans cette présence, le culte devient une abstraction. Par cette présence, nous allons à Dieu directement, et nous l’approchons comme pendant sa vie mortelle.

 

Quel malheur, si nous étions réduits, pour honorer l’humanité de Jésus-Christ, à reporter nos souvenirs à dix-huit siècles en arrière ! C’est bon pour l’esprit. Mais comment rendre l’hommage extérieur à un passé aussi éloigné ? Nous nous contenterions de remercier sans entrer dans la participation des mystères. Mais actuellement, je puis venir adorer comme les bergers, me prosterner comme les mages. Nous n’avons plus à regretter de n’avoir pas été à Bethléem ni au Calvaire.

 

Non seulement la présence de Jésus est la vie du culte extérieur, mais elle nous donne l’occasion de faire l’aumône à Notre-Seigneur. Oui, nous sommes plus heureux que les saints sous ce rapport. Ils reçoivent, mais ils ne donnent plus. Et il a été dit : « Mieux vaut donner que recevoir ». Or, nous donnons à Jésus ! Nous lui donnons de notre argent, de notre pain, de notre temps, de nos sueurs et de notre sang.

 

N’est-ce pas la plus grande des consolations ? Notre-Seigneur ne vient du ciel qu’avec sa bonté. Il n’a rien d’autre, et il attend de ses fidèles toutes ses conditions d’existence d’ici-bas. Son temple, la matière de son sacrifice, les lampes, les vases sacrés nécessaires pour qu’il se fasse sacrement : nous lui donnons tout !

 

Sans ces lumières, sans ce petit trône, Notre Seigneur ne peut sortir de son tabernacle. Nous les lui donnons, et nous pouvons dire : « Vous êtes sur un beau trône, c’est nous qui l’avons élevé ; c’est nous qui avons ouvert la porte de votre prison et déchiré le nuage qui vous cachait, ô Soleil d’amour ! » Dardez vos rayons maintenant dans tous les cœurs. Et Jésus nous doit !

 

Il peut payer ses dettes, il les payera. Il s’est fait garant de ses membres pauvres été souffrants : Tout ce que vous ferez au plus petit de mes frères, je vous le rendrai au centuple. Mais si Jésus paye les dettes des autres, à plus forte raison payera-t-il les siennes.

 

Au jour de votre jugement, nous pourrons lui dire : « Nous vous avons visité non seulement dans vos pauvres mais en vous-même, votre auguste Personne. Que nous donnerez-vous en retour ? » Les gens du monde ne comprendront jamais cela. Donnez, donnez aux pauvres ; mais aux églises, à quoi cela sert-il ? C’est perdu, ces profusions sur les autels ! Non, l’Eglise veut un culte vivant, parce qu’elle possède son Sauveur vivant sur la terre. Quel bonheur donc de se faire des rentes éternelles en donnant à Notre-Seigneur ! N’est-ce rien ? Mais ce n’est pas tout. Donnez à Jésus est une consolation, un bonheur. C’est de plus un besoin.

Oui, nous avons besoin de voir, de sentir auprès de nous Notre-Seigneur, et de l’honorer, par nos dons. Si Notre-Seigneur ne voulait de notre part que des hommages intérieurs, il manquerait de répondre à un besoin impérieux de l’homme. Nous ne saurions aimer sans montrer notre amour par des témoignages extérieurs, d’amitié et d’affection. Aussi la balance de la foi d’un peuple est toute faite dans ses dons aux églises. Si le luminaire brille, si les linges sont propres, les ornements décents et entretenus, oh ! il y a la foi, là ! Mais si Notre-Seigneur est sans ornements, dans une église qui ressemble plutôt à une prison, la foi manque ! Que nous sommes misérables à ce point de vue en France.

 

On donne pour toutes les œuvres de bienfaisance. Vous demandez pour le Très-Saint-Sacrement, on ne sait pas ce que vous dites. Pour orner l’autel de quelque saint, pour un pèlerinage où s’opèrent des guérisons, on donne encore. Mais au Très-Saint-Sacrement ? Rien !

 

Le roi ira donc en haillons pendant que les serviteurs seront bien ornés ? On n’a pas la foi, la foi agissante, la foi qui aime. On n’a qu’une foi spéculative, négative. Notre-Seigneur est là. On lui demande sans cesse des grâces, la santé, une bonne mort. Mais on n’honore pas sa pauvreté du moindre don ! Si, dit saint Jacques, un pauvre vous demande l’aumône et que vous le renvoyiez sans rien lui donner, en lui disant : « Allez en paix » (Jc 2, 16), vous vous moquez de lui ! Voilà Notre-Seigneur qui n’a rien, qui attend tout de vous. Vous venez lui dire : « Je vous adore, je vous reconnais comme mon Roi, je vous remercie d’être dans le Très-Saint-Sacrement ». Et vous ne lui donnez rien pour l’honneur de son culte ! Car tous, oui, tous peuvent donner à Notre-Seigneur. Et l’expérience prouve que ce ne sont ni les grands ni les riches qui font les honneurs du culte eucharistique, mais la masse du pauvre peuple…

 

Un jour, Notre-Seigneur voyait les pharisiens mettre de grosses sommes dans le tronc. Il n’en paraissait nullement touché. Mais voici qu’une pauvre femme met un denier. C’était tout ce qu’elle avait, et Notre-Seigneur l’admire, son cœur est ému, et il ne peut s’empêcher de le dire à ses apôtres. Cette pauvre veuve avait donné plus que tous les autres, parce qu’elle avait donné de son superflu. De même celui qui se prive pour donner un cierge, une fleur, donne plus que celui qui facilement peut apporter de grosses offrandes. Jésus ne regarde guère la quantité des dons, mais le cœur qui les fait. Donnez, donnez donc à Notre-Seigneur ! Consolez son délaissement, secourez sa pauvreté.

 

 Mais voici davantage. Quoi ? Jésus est ici par amour ? Eh bien ! quand on croit à sa présence, quand on l’aime, je ne comprends pas qu’on ne lui donne pas ! Mettez même de côté la question des mérites et des grâces que vous obtenez par vos dons, n’est-ce pas un assez grand honneur que de pouvoir donner à Notre-Seigneur, que de pouvoir honorer le Roi ? Tout le monde, certes, n’est pas admis à présenter ses hommages à un roi de la terre. On ne l’obtient qu’à force de protections.

 

Oserait-on même, à moins d’être un familier avec un ami plus haut placé que soi, lui offrir un bouquet de fête ? Eh bien, Jésus est bien Roi, puisque c’est lui qui les fabrique, les rois, et cependant il déroge à l’étiquette des rois de la terre, il permet que nous lui présentions continuellement nos hommages, il les attend ! Ah, que cela nous honore ! Profitons-en, il n’y a qu’un temps pour donner. Ici-bas, Dieu veut bien recevoir de nos mains. Ah, puissiez-vous avoir souvent la consolation de dire : « J’ai donné à Notre-Seigneur ! » Il se donnera à vous en retour.

 

[…] « Commencez toutes vos adorations par un acte d’amour, et vous ouvrirez délicieusement votre âme à son action divine. C’est parce que vous commencez par vous-mêmes que vous vous arrêtez en chemin ; ou bien, si vous commencez par quelque autre vertu que l’amour, vous faites fausse route. Est-ce que l’enfant n’embrasse pas sa mère avant de lui obéir ? L’amour est la seule porte du cœur.

 

Voulez-vous être noble en l’amour ? Parlez à l’Amour de lui-même : parlez à Jésus de son Père céleste qu’il aime tant ; parlez-lui des travaux qu’il a entrepris pour sa gloire, et vous réjouirez son cœur, et il vous aimera davantage. Parlez à Jésus de son amour pour les hommes, et cela dilatera son cœur et le vôtre de bonheur et de joie.

 

Le vrai secret de l’amour est donc de s’oublier comme saint Jean-Baptiste pour exalter et glorifier le Seigneur Jésus. Le vrai amour en regarde pas ce qu’il donne, mais ce que mérite le Bien-Aimé.

 

Alors Jésus vous parlera de vous-mêmes ; il vous dira son amour pour vous, et votre cœur s’épanouira aux rayons de ce soleil, comme la fleur humide et refroidie par la nuit s’ouvre aux rayons de l’astre du jour. Sa douce voix pénètrera votre âme comme le feu pénètre un corps. Vous direz comme l’Epouse des Cantiques : Mon âme s’est liquéfiée de bonheur à la voix de mon Bien-Aimé (Ct 5, 6). Vous l’écouterez alors en silence, ou plutôt dans l’action la plus suave et la plus forte de l’amour : vous viendrez en lui. » […]

 

Saint Pierre Julien Eymard

 

 

Ma présence renouvelée dans une âme

l’entraîne toujours plus profond

envers ses frères…

 

Voilà pourquoi mon adversaire

s’acharne à éloignes mes petits

de la Sainte Eucharistie…

 

Mais j’y pourvoirai,

Je ferai plier les arbres sans racines,

Je les modèlerai à l’image de l’humilité,

du respect de mes volontés,

bientôt vous serez tous Un en Moi

comme Je suis Un avec mon Père

 

 

 

 

 

 

 

Laisser un commentaire

%d