Fécondité des œuvres par la vie intérieure – 4

Fécondité des œuvres

par la vie intérieure

Quatrième extrait de « L’âme de tout apostolat »

de Dom Chautard

 

d)      La Vie intérieure produit dans l’apôtre le rayonnement surnaturel. Combien ce rayonnement est efficace.

 

Un des obstacles les plus sérieux à la conversion d’une âme, c’est que Dieu est un Dieu caché : « Dieu absent » (Is, 45, 15)

 

Mais, par un effet de sa bonté, Dieu se dévoile en quelque sorte par ses saints, et même par les âmes ferventes. Le surnaturel transpire ainsi aux yeux des fidèles qui perçoivent quelque chose du mystère de Dieu.

Qu’est-ce donc que cette diffusion du surnaturel ? Ne serait-ce pas l’éclat de la sainteté, la splendeur de l’influx divin que la théologie nomme couramment la grâce sanctifiante, mieux encore peut-être le résultat de l’ineffable présence des Personnes divines en eux qu’elles sanctifient ?

 

Saint Basile ne l’expliquait pas autrement : lorsque l’Esprit-Saint s’unit aux âmes que sa grâce a purifiées, c’est, dit-il, pour les spiritualiser davantage. Pareil au soleil qui rend plus étincelant le cristal qu’il touche et pénètre de son rayon, l’Esprit sanctificateur rend plus lumineuses les âmes qu’il habite, et, par l’effet de sa présence, elles deviennent comme autant de foyers qui répandent autour d’elles la grâce et la charité.

 

Cette Manifestation du Divin qui se trahissait dans tous les gestes et jusque dans le repos de l’Homme-Dieu, nous le percevons dans certaines âmes douées d’une vie intérieure plus intense. Les conversions merveilleuses qu’opéraient certains saints par la renommée de leurs vertus, les pléiades d’aspirants à la vie parfaite qui venaient demander à les suivre, disent assez haut le secret de leur silencieux apostolat. Ainsi, avec saint Antoine, les déserts de l’Orient se peuplent. Par saint Benoît surgit cette phalange innombrable de saints religieux qui civilisent l’Europe. Une influence sans pareille est exercée par saint Bernard dans l’Eglise et sur les rois et sur les peuples. Saint Vincent Ferrier excite sur son passage l’enthousiasme indescriptible de foules innombrables et plus encore détermine leur conversion. A la suite de saint Ignace se lève une armée de vaillant dont un seul, Xavier, suffit à régénérer une quantité incroyable de païens. Le rayonnement de la puissance de Dieu lui-même à travers des instruments humains peut seul rendre raison de ces prodiges.

Quel malheur, quand parmi les personnes placées à la tête d’œuvres importantes il n’y en a point de vraiment intérieures. Le surnaturel paraît éclipsé et la puissance de Dieu est comme enchaînée. C’est alors, les saints nous l’enseignent, qu’un pays décline et que la Providence semble laisser aux méchants tout pouvoir de nuire.

 

Les âmes, sachons-le bien, perçoivent comme d’instinct, et sans même définir clairement ce qu’elles éprouvent, cette irradiation du surnaturel. Aussi voyez comme il vient se prosterner volontiers aux pieds du prêtre et implorer son pardon, le pêcheur qui reconnaît Dieu lui-même dans son représentant ! Et par contre n’est-ce pas du jour où le concept intégral de la sainteté cessa d’être l’idéal nécessaire du ministre de telle secte chrétienne, que celle-ci se vit amenée infailliblement à supprimer la confession ?

 

« Jean ne fit aucun miracle » (Jn, 10, 41). Sans faire de miracle, Jean-Baptiste attire les foules. La voix du saint Vianney était trop faible pour arriver à la foule qui se pressait autour de lui. Si on ne l’entendait guère, on le voyait, on voyait un porte-Dieu, et cette vue seule subjuguait les assistants et les convertissait. Un avocat revenait d’Ars. On lui demanda ce qui l’avait frappé : « J’ai vu Dieu dans un homme », répondit-il.

 

Qu’on nous permette de tout résumer par une comparaison un peu vulgaire. On connaît cette expérience d’électricité : placée sur l’isoloir, une personne est mise en communication avec une machine électrique. Son corps se charge de fluide, et dès qu’on l’approche, une étincelle jaillit donnant une commotion à celui qui prend contact avec elle. Ainsi en est-il de l’homme intérieur. Une fois détaché des créatures, il s’établit entre Jésus et lui une commotion incessante, comme un courant continu. L’apôtre devenu un accumulateur de vie surnaturelle condense en lui un fluide divin qui se diversifie et s’adapte aux circonstances et à tous les besoins du milieu où il agit. « Il sortait de lui une vertu qui les guérissait tous » (Lc, 6, 19). Paroles et actes ne sont plus chez lui que les effluves de cette force latente, mais souveraine pour renverser les obstacles, obtenir des conversions ou accroître la ferveur.

 

Plus les vertus théologales existent dans un cœur, plus ces effluves aident à faire naître ces mêmes vertus dans les âmes.

 

 

Représentation des vertus théologales

 

 

 

 

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