Dieu, la Sainte Trinité
8ème partie
Par Sœur Marie Lataste, mystique catholique
LIVRE 2
Le Verbe de Dieu fait homme
Chap. 18, « Pensez dans vos souffrances à celles que j’ai endurées ; cette pensée vous donnera force et courage. »
Un jour, après avoir fait la sainte communion, je me retirai dans mon cœur où Jésus était assis sur son trône. Aussitôt j’aperçus à ma gauche un immense fossé entouré d’une quantité de longs pieux d’or. Je vis dans ce fossé un monument superbe, doré à l’intérieur et d’un éclat ravissant. Ce monument, en forme de tour carrée, était ouvert par le haut. Il me sembla entendre un vent violent, venu de dessous terre, qui soufflait dans la tour dont il faisait sortir une fumée noire et épaisse, très abondante. L’odeur de cette fumée était insupportable. À cette vue, je me dis à moi-même : Voilà une image sensible du monde. L’éclat, le brillant du monde fascine les âmes, les trompe et les précipite dans le fossé si large et si vaste de l’enfer. Ô mon âme ! Aimeras-tu jamais ces vanités ? Te laisseras-tu tromper par ce faux brillant ? Rechercheras-tu ces plaisirs trompeurs ? Non, non, toujours tu te détacheras du monde, toujours tu le fuiras comme ton plus grand ennemi, toujours tu t’attacheras à Jésus, malgré les peines, les tribulations et les croix qui se présenteront sur ton chemin.
Aussitôt, une personne, que je n’avais jamais vue, vint à moi et me dit :
— Êtes-vous dans les dispositions que vous venez de manifester ?
— Oui, répondis-je, ce sont là les vraies dispositions de mon âme.
Elle me demanda pour la seconde fois :
— Êtes-vous dans les dispositions que vous venez de manifester ?
— Oui, répondis-je, ce sont là les vraies dispositions de mon âme.
Elle me demanda pour la troisième fois :
— Êtes-vous dans les dispositions que vous venez de manifester ?
— Oui, répondis-je, ce sont là les vraies dispositions de mon âme.
— Eh bien ! dit-elle alors, venez, suivez-moi.
Je la suivis et nous arrivâmes auprès d’une porte qui était fermée. Avant de l’ouvrir, elle me dit :
— Avez-vous du courage ?
Je répondis affirmativement, mais ma voix n’avait pas trop d’assurance. Elle me demanda encore :
— Avez-vous du courage ?
Je répondis sur le même ton.
— Avez-vous du courage ? me demanda-t-elle une troisième fois. Alors, me défiant de moi-même, je m’écriai : “Seigneur, venez à mon aide donnez-moi votre force et votre vertu !”
Et je répondis immédiatement après, avec une fermeté surhumaine :
— Oui, j’ai du courage ; je ne crains rien.
La porte s’ouvrit, et je montai un long escalier qui me conduisit dans un appartement au bout duquel se trouvait un autre escalier. Quand j’entrai dans cet appartement, un homme, caché derrière la porte, me frappa d’un vigoureux coup de bâton, qui m’enleva presque toutes mes forces. J’avais bien de la peine à monter le second escalier. Je le montai cependant. Là, je trouvai un homme qui, touché de compassion pour ma faiblesse, m’offrit un verre d’eau. Cette eau me rafraîchit et me donna un peu de vigueur. Je montai un nouvel escalier où je vis s’avancer vers moi un homme puissant, qui me donna deux soufflets qui m’étourdirent. Je tombai à terre sans pouvoir me relever. Dans ma détresse, je m’écriai : “Seigneur, venez à mon secours !” Alors, la personne qui m’accompagnait et une autre, qui accourut, me prirent dans leurs bras et me portèrent ainsi en haut d’un autre escalier où je trouvai un grand crucifix. Je me jetai à genoux, embrassai les pieds du Sauveur, lui fis part de mes peines et lui demandai de me délivrer de mes ennemis. Le Seigneur Jésus me dit, du haut de sa croix :
— Allez, ma fille, vos peines sont peu de chose en comparaison de mes peines ; relevez-vous, marchez, et pensez dans vos souffrances à celles que j’ai endurées ; cette pensée vous donnera force et courage.
J’embrassai de nouveau les pieds du Sauveur ; je montai un autre escalier, et j’arrivai dans un appartement dont le plancher et le plafond semblaient être une seule glace. Les murs étaient parsemés de glaces plus petites, de diverses dimensions, qui recevaient leur éclat de la glace d’en haut et d’en bas ; et je me dis à moi-même : Ce plancher et ce plafond me figurent Jésus-Christ au ciel et en la terre, versant sa lumière sur les saints qui la réfléchissent et se la renvoient mutuellement, et, passant des uns aux autres, elle revient ensuite au Sauveur Jésus. Je dois, moi aussi, revoir la lumière qu’il m’envoie de son trône du ciel et de son trône du tabernacle, et réfléchir cette lumière pour éclairer les ténèbres de mon prochain et le ramener à Jésus, autant que Dieu me le permettra.
Aussitôt la glace supérieure s’entrouvrit en forme de tour, se disposa en forme d’escalier dont les échelons, brillants et polis, conduisaient à un petit pavillon sans muraille, mais tout en colonnettes, d’un éclat éblouissant, Jésus était au milieu. Il m’appela ; je montai vers lui, et, à mesure que j’avançais, je sentais mon cœur plus enflammé d’amour pour mon Sauveur. Quand je fus près de lui, il me tendit la main ; je me jetai à ses genoux et me perdis dans les douceurs de sa présence, éprouvant une félicité au-dessus de toutes les félicités du monde, et je ne pus que m’écrier :
— Sauveur Jésus, combien votre service est aimable ! Qu’on est heureux de vivre près de vous, avec vous, en vous !