Le secret du pardon
Textes choisis par les moines de l’abbaye de Solesmes
« Si je demandais à un enfant : Qu’est-ce que la confession ? Il me répondrait simplement que c’est l’accusation de ses péchés faite à un prêtre approuvé, pour en recevoir l’absolution, c’est-à-dire le pardon. – Mais pourquoi, me direz-vous, est-ce que Jésus-Christ nous assujettit à une accusation si humiliante, qui coûte tant à notre amour propre ? – Mon ami, je vous répondrai que c’est précisément pour nous humilier que Jésus-Christ nous y a condamnés. Il n’est pas douteux qu’il est pénible à un orgueilleux d’aller dire à un confesseur tout le mal qu’il a fait, tout celui qu’il a eu à dessein de faire, tant de mauvaises pensées, tant de désirs corrompus, tant d’actions injustes et honteuses qu’on voudrait pouvoir cacher soi-même. Mais vous ne faites pas attention que l’orgueil est la source de tous les péchés, et que tout péché est une orgueilleuse révolte de la créature contre le Créateur ; il est donc juste que Dieu nous ait condamné à cette accusation si humiliante pour un orgueilleux. Mais regardons cette humiliation des yeux de la foi, est-ce une chose bien pénible que de changer une confusion publique et éternelle, avec une confusion de cinq minutes qu’il nous faut pour dire nos péchés à un ministre du Seigneur, pour regagner le ciel et l’amitié de notre Dieu ? – Pourquoi, me direz-vous, il y en a qui ont tant de répugnance pour la confession, et que la plupart s’en approchent mal ? – Hélas ! Mes frères, c’est que les uns ont perdu la foi, les autres sont orgueilleux et d’autres ne sentent pas les plaies de leur pauvre âme, ni les consolations que la confession procure à un chrétien qui s’en approche dignement. Qui est celui, mes frères, qui nous commande de nous confesser de tous nos péchés, sous peine de damnation éternelle ? Hélas ! Mes frères, vous le savez aussi bien que moi, c’est Jésus-Christ lui-même ; et tous y sont obligés, depuis le Saint-Père jusqu’au dernier des artisans. Mon Dieu, quel aveuglement de mépriser et de ne pas faire cas d’un moyen si facile et si efficace pour gagner un tel bonheur infini, en se délivrant du plus grand de tous les malheurs. » (Saint Jean-Marie Vianney, Sermon sur les qualités de la confession)
Le saint curé d’Ars, à notre époque, ne tiendrait sans doute pas un autre langage pour déplorer le peu d’empressement que mettent les chrétiens à recourir à la confession sacramentelle. Du moins peut-on remarquer que les fidèles qui se confessent aujourd’hui le font habituellement dans de bonnes dispositions. Ceux qui s’en abstiennent peuvent bien alléguer tous les prétextes. En réalité, c’est avant tout l’orgueil qui les retient d’entreprendre une démarche personnelle pour reconnaître leurs fautes devant le représentant de Dieu. Dieu seul peut remettre les péchés, mais il a voulu que son pardon nous soit accordé dans une rencontre avec le Christ présent dans le prêtre qui reçoit l’aveu. Cela correspond à la manière dont le Seigneur a voulu nous sauver par son humanité et par son Église qui perpétue sa présence visible au milieu des hommes.
La pratique de la pénitence sacramentelle a connu toute une évolution au cours des âges. De la pénitence publique des premiers siècles, on en est venu peu à peu à la confession en privé. Limitée d’abord aux fautes graves, l’accusation s’est étendue aux péchés véniels et le recours au sacrement est devenu plus fréquent. Le sens commun des fidèles, si bien qu’il ne saurait être question de revenir en arrière. Dans son exhortation apostolique Reconciliatio et poenitentia, Jean-Paul II a consigné les résultats du Synode des évêques de 1983 et présenté une synthèse remarquable de la doctrine de l’Église à ce sujet. Le présent recueil en donne de larges extraits, où sont rappelées les bases théologiques et les règles pratiques ainsi que les dispositions requises pour que le sacrement produise tous ses fruits.
Le Christ a sauvé tous les hommes en mourant pour eux sur la croix, mais il faut que chacun accueille librement ce salut en reconnaissant qu’il en a besoin – « Père, j’ai péché ! » – et en recevant la parole libératrice : « Tes péchés te sont remis ; va et ne pèche plus. »