Dieu, la Sainte Trinité
10ème partie
Par Sœur Marie Lataste, mystique catholique
LIVRE 3
La Sainte Vierge Marie,
mère de Notre-Seigneur Jésus-Christ
Chap. 6, « Dites avec Marie : “Voici la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon votre parole.” »
2ème Partie
« La grâce que Marie a trouvée devant mon Père, est moi. Je suis la grâce de Dieu le Père, je suis la splendeur de sa gloire, et Marie m’a trouvé par sa sainteté, par sa vertu, par sa virginité. Elle m’a trouvé et je viendrai en elle, et je me donnerai à elle, et elle se donnera à moi. Ma divinité descendra en son humanité, son humanité voilera ma divinité ; ma divinité remplira son humanité ; vierge, elle deviendra mère ; vierge mère, elle sera mère de Dieu, elle sera ma mère.
« Voilà la dignité que l’ange annonce à Marie, et cette dignité étonnante pour le ciel et pour la terre le fut aussi pour Marie. Elle s’écria :
“Comment cela pourra-t-il s’opérer, je ne connais point d’homme ?”
« Je désire, ma fille, que vous compreniez bien ces paroles ; écoutez-moi avec plus d’attention. Il n’y a point un doute sur la parole de l’ange : Marie savait que je devais naître d’une vierge, et son âme était pleine de foi dans les promesses de Dieu. Mais elle ne savait point de quelle manière je devais naître d’elle. Être vierge et mère en même temps, c’est là un mystère que nul ne comprendra jamais, et Dieu n’avait point révélé la manière dont il devait opérer cette étonnante maternité. Aussi Marie s’écrie : « Comment cela s’opèrera-t-il, je ne connais point d’homme ? » Loin d’être une parole de doute, cette parole est pleine de croyance et de foi ; une parole de croyance au pouvoir de Dieu, à sa maternité et aussi à la conservation de sa virginité. C’est une parole de vénération pour le pouvoir de Dieu, de remerciement pour la maternité promise, d’action de grâces pour sa virginité conservée. Quel est ce mode nouveau que Dieu emploiera pour opérer son œuvre ? Quelle est cette nouvelle faveur que Dieu me réserve ? Telle était la pensée de Marie.
« Vous devez remarquer aussi que cette parole n’est pas une parole uniquement de Marie, c’est une parole de Dieu, comme les paroles de l’ange étaient aussi paroles de Dieu. Dieu voulait par cette parole et sa conservation dans l’Évangile faire éclater la vérité de sa promesse, faire observer la réalisation des prophéties, tout en relevant la dignité, la pureté, la sainteté de la créature qu’il avait choisie pour être sa mère.
« Marie, par sa virginité, a attiré Dieu en elle. Il fallait que cette virginité apparût toute brillante aux yeux de tous les hommes ; et que cette vertu, manifestée en elle d’une manière si éclatante, demeurât parmi les hommes comme l’expression de ce qui pouvait être le plus agréable à Dieu. Dieu ne voulait pas seulement que j’habitasse en Marie, il voulait aussi que je vinsse habiter dans les enfants des hommes ; il voulait que parmi les enfants des hommes je choisisse un peuple, un peuple privilégié, dont la pensée s’élevât au-dessus de la terre et des sens, méditât, dans une chair sujette à la corruption et captivée par les sens, le mystère de l’union incorruptible entre Dieu et l’homme, que ce peuple se demandât toujours :
“Comment, dans ma faiblesse, dans ma misère, dans mon indignité, arriverai-je à unir Dieu à ma chair ?”
« Et qu’il comptât comme Marie sur les paroles de l’ange :
“Le Saint-Esprit descendra en vous, la vertu du Très-haut vous couvrira, et ce qui naîtra de vous est saint et sera appelé le Fils du Très-Haut.”
« Oui, ma fille, dans l’œuvre de mon incarnation en Marie, il n’y a eu que l’œuvre de Dieu. Les hommes n’y ont point eu de part. Tout a été divin dans cette nouvelle création. Le Saint-Esprit est venu lui-même opérer en Marie cette merveille, la vertu de mon Père a soutenu Marie dans la création de mon humanité en elle ; mon humanité unie à la divinité a été sainte comme ma divinité, et j’ai été appelé parmi les hommes du nom que je portais dans le sein de mon Père, du nom qui désigne et exprime ce que je suis, le Fils de Dieu.
« Voilà le prodige merveilleux, dont l’explication est donnée à Marie, que les femmes stériles devenues mères dans l’ancienne loi avaient annoncé, qu’Élizabeth sa cousine, devenue mère aussi malgré sa stérilité, annonçait également, non pas dans sa totalité, mais comme signe de l’efficacité de la puissance de Dieu, dont pas une promesse n’est irréalisable.
« Heureuses les âmes qui, comme Marie, suivent, dès leur enfance l’attrait que Dieu met dans leur âme, qui se consacrent à lui et ne désirent d’autre union que son union ! En vérité, je vous le dis, ma fille, ces âmes deviendront ma mère comme Marie ; je reposerai en elles, non seulement neuf mois, mais toute leur vie, et pendant l’éternité elles reposeront en moi. J’aurai pour elles, comme j’en ai eu pour Marie, des faveurs spéciales sur la terre et dans le ciel. Ma fille, je vous appelle à moi, dites avec Marie :
“Voici la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon votre parole.”
« Prononcez souvent ces mots, prononcez-les comme Marie, les yeux levés au ciel, votre cœur tout entier abandonné à Dieu, votre esprit et votre âme ne demandant, ne désirant, ne cherchant que la volonté de Dieu.
« Ma fille, quand l’ange eut fini de parler, il avait achevé sa mission et n’attendait que la réponse de Marie. J’étais à même de m’incarner en Marie, mais il fallait le consentement de Marie. Dieu allait renouveler son alliance avec les hommes, mais cette alliance devait être acceptée par Marie, et Dieu, et l’ange, et moi qui vous parle nous attendions la réponse de Marie. Ô puissance, Ô grandeur communiquée à Marie ! Jamais, Dieu ne s’était soumis à l’homme, et il se soumet à Marie ; jamais Dieu n’avait consulté l’homme, et il consulte Marie ; jamais Dieu n’avait fait dépendre son action de l’homme, et il fait dépendre la plus admirable de ses actions de Marie. Ô parole de Marie ! Ma fille, n’en avez-vous point distingué l’accent ? N’était-ce point ma parole que vous avez distinguée dans la parole de Marie ? Je suis la parole éternelle de Dieu, j’allais m’incarner dans Marie, et déjà ma parole était en elle comme un essai de ce que j’allais produire par elle dans le monde :
“Voici la servante du Seigneur, qu’il me soit fait selon votre parole.”
« Le résumé de mon incarnation est dans cette parole. Il n’y a que deux choses en elle : humilité et puissance : l’une et l’autre existent séparément, mais il semble que la seconde ne se manifeste que par la première. Ce n’a été que par mon humiliation jusqu’à la mort et jusqu’à la mort de la croix, que j’ai voulu manifester ma puissance sur la mort, sur l’enfer, et sur l’homme pécheur à qui je rendais la grâce et la liberté.
« Marie, au moment où le messager du ciel proclame ses grandeurs, s’humilie jusque dans le plus intime de son être : “Voici la servante du Seigneur.” Mais cette humilité acquit une force toute divine, qui m’attire et m’incarne en elle par la puissance d’un commandement auquel je ne résiste point : “Qu’il me soit fait selon votre parole” !
« L’œuvre de mon incarnation fut accomplie par cette parole. J’habitai dès lors corporellement en Marie, et le ciel adora ce mystère de l’abaissement du Fils de Dieu, de sa miséricorde et de son amour pour les hommes, et de la dignité, de la grandeur, de la puissance de la Vierge que j’avais choisie pour être ma mère. »
Voilà ce que je me rappelle de mon entretien avec le Sauveur sur le mystère de l’Annonciation. Je n’ai point parlé comme le Sauveur, mais comme j’ai su et comme il me l’a permis. Ce que je ne puis et ne sais point dire, c’est le bonheur que l’onction de sa parole mit dans mon âme. Je le remerciai de l’instruction qu’il m’avait donnée et le priai de me faire participer aux sentiments de Marie au jour de l’Annonciation.