FIN DU MONDE PRÉSENT
ET
MYSTÈRE DE LA VIE FUTURE
PREMIÈRE CONFÉRENCE
LA FIN DU MONDE
LES SIGNES DONT ELLE SERA PRÉCÉDÉE ET LES CIRCONSTANCES QUI L’ACCOMPAGNERONT.

La science matérialiste et athée de notre siècle, celle qui se propage dans les revues, qui s’enseigne dans la plupart des chaires officielles et qu’accréditent les grands courants de l’opinion antichrétienne actuelle, s’obstine à ne voir que l’effet du hasard dans l’ordre et la perfection de l’univers. Elle affirme l’éternité de la matière… Niant la création, elle ne saurait logiquement admettre que le monde puisse avoir une fin.
III. PAR QUELLE VOIE AURA LIEU CETTE GRANDE DESTRUCTION ?
Mais, par quelle voie aura lieu cette grande destruction, quelle en sera la cause occasionnelle ou efficiente, l’agent principal, l’instrument direct et immédiat ? Les saintes Écritures n’ont voulu omettre aucune des circonstances relatives à cet événement, le plus décisif et le plus solennel de tous ceux qui se sont succédé depuis la création. Elles nous apprennent donc que le monde ne périra pas par une inondation comme au déluge, qu’il ne s’écroulera pas par un tremblement et ne sera pas enseveli sous les cendres et sous les laves, comme le furent, sous le règne de Titus, Herculanum et Pompéï, mais qu’il sera mis en combustion et exterminé par le feu : Terra autem et quœ in ipsa sunt opera exurentur [30]. C’était déjà la croyance antique, celle des Égyptiens et des philosophes persans. Cicéron a dit que le monde finirait par le feu [31].
Mais, ce qui est remarquable, c’est que la science actuelle s’accorde avec les Livres saints, pour témoigner que le feu sera le grand ouvrier de la justice de Dieu et du renouvellement qui en suivra la manifestation [32].
Ainsi, la science a constaté, comme la Bible, que le feu est la première force créée qui ait déployé son énergie et manifesté son activité. C’est par le feu que la nature a été fécondée, les éléments mis en travail ; c’est par lui que se sont opérées les grandes révolutions du monde primitif, que le soulèvement des montagnes a eu lieu, que se sont produits les astres, et que finalement est sorti tout cet ordre, toute cette variété de l’univers tel qu’il s’offre à nos regards et à notre admiration.

« Au commencement, est il dit dans la Genèse, chap. 1er, vers. 2 : la terre était vide et sans consistance et les ténèbres régnaient sur toute la face de l’abîme. » En d’autres termes, comme nous l’expliquent les savants et les commentateurs, la matière était volatilisée et à l’état de vapeur. Avant que le Créateur lui eût conféré ses propriétés et ses formes diverses, en la classant et en la coordonnant par l’œuvre des six jours, tous ces éléments constitutifs étaient confus, désunis, à l’état de chaos.
La terre, le soleil, les astres, offraient l’image d’une vaste mer liquescente ou gazeuse éparse dans l’immensité. – Mais cette mer n’était pas immobile et inerte. A sa surface et dans ses plus intimes profondeurs elle bouillonnait et était mise en mouvement sous le souffle vivificateur d’un agent éternel et tout puissant, qui n’était autre que l’Esprit de Dieu : Et spiritus Dei ferebatur super aquas [33]. L’Esprit Saint faisait subir à la substance matérielle une sorte d’incubation. Sous l’action et par les ardeurs de cette chaleur infinie et souveraine, les éléments étaient soumis à une fonte et à une refonte, ils se perfectionnaient, ils acquéraient leur puissance et leur énergie, ils se dépouillaient de leurs scories, comme l’or qui se raffine et se dégage de sa rouille dans le creuset où il est jeté. Et lorsque, ainsi transformés au souffle de cette fournaise du divin Esprit, ils furent rendus aptes à entendre la voix de Dieu, le Créateur les appela successivement et il dit : « Que la lumière soit, et la lumière fut. » Et après qu’il eut fait la nuit et le jour, qu’il eut étendu le Ciel, il dégagea la matière solide de la masse vaporeuse qui l’enveloppait, et il dit : « Tu t’appelleras la terre » et la terre fut consolidée. Il parla aussi aux eaux, et ne laissant sur notre globe, de la partie liquide, que ce qui était nécessaire pour l’arroser et remplir les bassins des mers, il envoya le reste, à l’état de vapeur ou d’éther, remplir les vastes espaces qui sont au dessus de toutes les sphères et de tous les firmaments [34] : Divisitque aquas quœ erant sub firmamento, ab his quœ erant super firmamentum [35].

Ce fut là une grande et sublime scène, qui donnerait lieu à de longs et de magnifiques développements. Qui ne sentirait son esprit s’élever et son cœur tressaillit au spectacle de l’acte créateur, de ce chef-d’œuvre de la puissance et de la sagesse divines, faisant jaillir des flots de lumière et de beauté de cet océan informe et ténébreux, imprimant le mouvement et l’action à tous les êtres inertes que le divin Esprit avait investis de sa vertu en les pénétrant de ses ardeurs et de ses radiations ? Et spiritus oris ejus omnis virtus eorum [36]. Mais aujourd’hui nous ne pouvons parler de ces œuvres admirables qu’accidentellement et dans la mesure où elles se rattachent au sujet que nous avons entrepris.
Or, ce même Esprit de Dieu, qui a répandu à pleines mains dans l’univers des trésors d’harmonie et de perfection, procédera par la même voie quand il s’agira d’ordonner de nouveaux cieux, et de construire ce palais qui devra éternellement servir de demeure à l’homme glorifié.

Ici, nous ne faisons pas de la fantaisie, notre parole n’est pas nôtre ; elle est celle de tous les prophètes qui ont parlé, de tous les évangélistes qui ont écrit : « Le feu, est il dit, marchera devant la face du Seigneur, il dissipera ses ennemis dans les alentours, il mettra les montagnes en fusion, et les collines s’écouleront comme de la cire [37] ». – Devant son éclat le soleil s’obscurcira et la lune ne donnera plus de lumière, les étoiles tomberont. C’est à dire que, dissoutes une seconde fois, elles se dissiperont dans les airs comme des gouttes légères [38].
Ce feu sera celui qui dévorera les méchants comme de la paille, qui pénétrera leurs os jusqu’à la moelle et qui les consumera éternellement.
Il sera la dernière épreuve des justes qui vivront dans les derniers jours. Il suppléera pour eux au Purgatoire dont, au moment de la résurrection, les flammes réparatrices s’éteindront pour ne plus se rallumer. Il sera le creuset où ils déposeront les restes de leur rouille terrestre, afin qu’aucune souillure n’obscurcisse la blancheur de leurs vêtements, lorsqu’ils paraîtront devant le trône de Dieu.
Tous ces événements se réaliseront, n’en doutons pas, ils sont certains d’une certitude absolue, comme l’est Dieu lui même, comme l’est son esprit de vérité, qui n’est sujet à aucune erreur ni à aucun changement.
On peut affirmer, à la vérité, que tous, tant que nous sommes ici, nous aurons quitté ce bas monde avant d’être les témoins de cette grande scène de désolation et de ruine ; Jésus Christ pourtant a jugé utile que nous en soyons renseignés, parce que ces grandes vérités ne sont pas d’un ordre spéculatif, mais qu’elles sont destinées à exercer sur la conduite de notre vie des effets pratiques et immédiats.

En effet, si la terre et tout ce qu’elle renferme doivent un jour disparaître par le feu, les biens de ce monde ne sont pas plus estimables que le bois et que la paille ; et alors, à quoi bon en faire l’objet de nos désirs et de nos préoccupations ? Pourquoi chercher à bâtir et à laisser des traces de notre génie et de notre puissance, là où nous n’avons pas de demeure permanente, et où la figure de ce monde sera emportée comme une tente qui n’a pas de voyageurs à abriter ?
Dirons nous que cet effrayant cataclysme ne se réalisera que dans les siècles des siècles ? Mais Jésus Christ nous dit que ces siècles des siècles ne sont qu’un instant auprès de l’Éternité, et lorsque le moment sera venu, lorsque des régions de la vie future nous serons les témoins et les acteurs de ce drame suprême, toute la durée de l’humanité nous semblera si courte, que c’est à peine si nous jugerons qu’elle a eu la durée d’un jour [39].
Saint Paul, le grand prophète, pour qui le temps n’avait pas de mesure, ni l’espace d’étendue, s’y croyait déjà transporté. Saint Jérôme dans sa grotte de Bethléem, entendait la trompette du jugement éveillant les morts, et ses cheveux se hérissaient de crainte, sa chair et ses os tressaillaient d’un indicible frisson. Enfin, Jésus Christ nous dit de méditer ces grands enseignements, car il est certain que nous serons surpris, et que l’heure viendra plus tôt que nous ne le pensons.

A la fin du XIVe siècle, un personnage extraordinaire parut au fond des Espagnes. Il s’appelait Vincent Ferrier. Prophète et thaumaturge dès sa jeunesse, il grandit au milieu de l’étonnement universel ; l’Esprit de Dieu reposa sur lui, il s’empara de son cœur et l’enflamma d’un zèle inconnu depuis saint Paul. Il posséda son corps qu’il soutint malgré son extrême faiblesse au milieu des plus accablantes fatigues et des plus rudes austérités. Dans ses mains il mit le pouvoir des miracles, enfin il ouvrit ses lèvres à la parole la plus prodigieusement puissante que depuis saint Paul l’humanité ait jamais entendue. Être surhumain, quoiqu’il fût homme, il refusa constamment les dignités que le Pape le pressait d’accepter. Sa vie fut une prière, un jeûne, une prédication continue. – Pendant vingt ans, il parcourut l’Europe, et pendant vingt ans l’Europe frémit, palpita sous la chaleur et à la flamme de ses accents inspirés [40].
Le jugement dernier était le sujet favori de ses prédications. Lui même annonçait au monde qu’il avait été envoyé spécialement par le souverain Juge pour annoncer l’approche des derniers jours.
Or, c’était un jour à Salamanque, ville par excellence des théologiens et des savants. Un peuple innombrable se pressait pour entendre l’envoyé du Ciel. Tout à coup, élevant la voix au milieu de l’assemblée : Je suis, dit il l’ange de l’Apocalypse que saint Jean vit voler par le milieu du Ciel et qui criait à haute voix : « Peuples, craignez le Seigneur et rendez lui gloire, parce que le jour du jugement approche ».
A ces paroles étranges, un murmure indescriptible éclate dans l’assemblée. On crie à la démence, à la jactance, à l’impiété. L’envoyé de Dieu s’arrête un instant, les yeux fixés au ciel, dans une sorte de ravissement et d’extase puis il reprend, et d’une voix plus forte, il s’écrie de nouveau : « Je suis l’ange de l’Apocalypse, l’ange du jugement ». – L’agitation et les murmures sont à leur comble. – Tranquillisez vous, dit le saint, ne vous scandalisez pas de mes paroles, vous allez voir de vos yeux que je suis ce que je dis. – Allez, à l’extrémité de la ville, à la porte Saint Paul, vous trouverez une femme morte ; apportez la ici, je la ressusciterai en preuve de ce que saint Jean a dit de moi. De nouveaux cris et une protestation plus grande encore accueillent cette proposition. Cependant quelques hommes se décident à se rendre à la porte indiquée. Ils y trouvent. en effet, une femme morte, ils la prennent et viennent la déposer au milieu de l’assemblée. L’apôtre, qui n’a

pas quitté un instant le lieu élevé d’où il prêchait, s’adresse à la défunte : « Femme, dit il, au nom de Dieu, je vous ordonne de vous lever ». – Aussitôt la morte se soulève, enveloppée de son linceul, elle laisse tomber le suaire étendu sur son visage et se montre pleine de vie au milieu de l’assemblée. – Vincent ajoute alors : « Pour l’honneur de Dieu et le salut de tout ce peuple, dites, maintenant que vous pouvez parler, si je suis vraiment l’ange de l’Apocalypse, chargé d’annoncer au monde l’approche du jugement dernier ». : « Vous êtes cet ange, répond la femme, vous l’êtes réellement ». Pour placer ce merveilleux témoignage entre deux miracles, le saint lui dit encore : « Préférez vous rester en vie, ou voulez¬-vous mourir de nouveau ? » – « Volontiers je vivrais, dit la femme. » « Vivez donc, reprend le saint ». – Elle vécut en effet un grand nombre d’années encore, témoin vivant, dit un historien, d’un étonnant prodige et de la plus haute mission dont jamais homme ait été investi.
Nous ne discutons pas l’authenticité de ce récit. Il a soulevé des doutes auprès de quelques hagiographes, et les circonstances dont il est accompagné ont donné lieu à des critiques et à des discussions. Mais à l’appui de notre doctrine, il nous suffit de constater que l’Église ne l’a pas déclaré apocryphe, puisque dans la bulle de canonisation du saint, il est dit : « Il eut les paroles de l’Évangile éternel pour annoncer, comme l’ange qui volait au milieu du Ciel, le royaume de Dieu à toute langue, à toute tribu, à toute nation, et pour démontrer l’approche du jugement dernier. »
Toutefois, il y a près de cinq cents ans que cet événement s’est accompli et le jugement annoncé par le thaumaturge du XIVe, siècle n’a pas eu lieu. Devons nous en conclure que le saint a été induit en erreur, et que le miracle de cette résurrection attesté par des témoins graves et dignes de foi, retracé et transmis par la sculpture et par la peinture, doive être mis au rang des légendes, réputé une allégorie et une simple invention ?

Saint Vincent Ferrier a parlé comme l’avaient fait avant lui de saints docteurs, et comme l’ont fait après lui la plupart des grands hommes apostoliques. Ainsi, saint Jérôme blâme, à la vérité, un certain Juda, écrivain renommé d’une Histoire Ecclésiastique, parce qu’il avait affirmé que la violence des persécutions présageait la fin du monde, et qu’elle aurait lieu dans un temps rapproché ; mais le même saint Jérôme dans une de ses lettres [41], où il trace avec élégance le tableau des calamités et des désastres dont il a été le témoin. énonce lui aussi presque la même opinion. – Saint Cyprien (Ep. 58) écrit ces paroles : « Vous devez être assurés et tenir pour certain que le jour des désolations extrêmes a commencé à se lever sur vos têtes, et que les temps de l’Antéchrist sont proches… » – Saint Ambroise, dans l’éloge funèbre de son frère Satyre, s’écrie : « Il a été enlevé de la vie afin qu’il ne fût pas témoin de la fin du monde, et de la destruction totale de l’univers. » – Saint Grégoire le Grand, saint Bernard ont exprimé les mêmes sentiments dans leurs li¬vres et dans leurs discours. Ces illustres docteurs et ces grands saints ont ainsi parlé, soit parce qu’ils voyaient la foi s’éteindre, et les calamités de leurs siècles s’accroître chaque jour dans de plus effrayantes proportions, soit parce qu’ils étaient saisis de crainte à la pensée de ce grand jour, et qu’ils voulaient inoculer cette crainte salutaire aux hommes égarés, afin de les ramener à la connaissance de Dieu et à la pratique du bien. – Pourtant on ne peut dire qu’il se soient écartés de la vérité ; ils ont parlé suivant les Écritures, qui, insistant sur cette vérité fondamentale, ne cessent de nous montrer comme imminente la perspective de l’avènement du Juge divin : Prope est jam Dominus.
En cela, les Apôtres et les écrivains inspirés ne nous ont pas trompés, par la raison que les temps ne sont rien pour ceux qui ont franchi les confins de la vie terrestre. – Toute la mesure des siècles, dit l’Esprit Saint, n’est pas plus que le jour qui s’écoule, tanquam dies hesterna quœ prœteriit. De même que, dans le firmament, il y a des étoiles séparées par des myriades de lieues et qui, en raison de leur distance, semblent se confondre et ne former qu’un seul point, quand on les observe de cette terre, ainsi des hauteurs de la vie de Dieu, où nous serons un jour plongés, les temps seront comme s’ils n’étaient pas. Un an, cent mille ans, des millions d’années contemplées du sein de l’éternité, ne nous apparaîtront que comme de simples points. Nous les estimerons des durées tellement microscopiques, tellement centésimales, qu’en un sens, elles n’auront entre elles aucune différence que notre esprit puisse apprécier.

En conséquence, il est permis en toute vérité d’appliquer à la résurrection générale comme aux résurrections partielles opérées par Jésus Christ, cette parole de l’évangéliste saint Jean : Elle est venue l’heure où ceux qui sont dans les mausolées et dans les sépulcres entendront la voix du Fils de Dieu : Venit hora, et nunc est quando mortui audient vocem Filii Dei, et qui audierint vivent [42]. Du reste, à la mort, notre sort éternel sera irrévocablement fixé, et le jugement particulier qui doit la suivre déterminera prochainement dans quelles conditions nous figurerons aux assises de la justice divine et le rang qui nous y sera assigné.
En face de cette conclusion inévitable des destinées humaines, les agitations de notre politique ne sont autre chose qu’un vain bruit. Les révolutions, qui font disparaître les peuples et qui précipitent les républiques et les empires, sont moins que ne l’est sur un théâtre un renouvellement de scène et un changement de décors. Toutes ces entreprises colossales et ces travaux merveilleux auxquels les hommes occupent leur esprit, et qu’ils conduisent à leur perfection au prix des plus grands sacrifices et des plus périlleux efforts, n’apparaissent que comme une fumée, et sont des œuvres plus fragiles que la toile tissée par l’araignée, et qui, le plus souvent n’a pas la durée d’un jour.
Alors il n’y aura plus d’autre distinction entre les hommes que celle du mérite et de la vertu. Toutes les pensées vaines et ambitieuses auront disparu. La politique aura cessé. La science elle-même sera détruite, scientia destretur [43].
Heureux ceux qui auront entendu la parole divine et l’auront gardée fidèlement dans leur cœur. Heureux ceux qui, se réveillant de leur sommeil, auront, suivant la recommandation de l’Apôtre, marché honnêtement et comme de jour. Heureux ceux qui, comme les vierges sages, auront entretenu soigneusement l’huile de leur lampe, et construit leur gerbe pour le jour de l’éclatante et solennelle moisson !

Ceux là seront appelés les prédestinés, parce que, comme parle saint Jean, leurs noms sont écrits dans le livre de vie de l’Agneau, qui a été tué depuis l’origine du monde. Puisse cette destinée être la nôtre.
Ainsi soit il !
NOTES
[30] 1 Le livre d’Henoch, bien qu’apocryphe, semble contenir les principales croyances qui avaient cours en Judée au temps de Jésus Christ. Quand les hommes, est il dit, auront comblé, la mesure de leurs iniquités envers Dieu et envers, Israël, alors viendra le grand cataclysme dont le déluge n’a été que le prélude et comme l’avertissement. Cette fois ci, la justice divine ira jusqu’au bout ; le mal sera vaincu à jamais ; la terre sera purifiée par le feu, non plus par ]’eau. Sous des cieux nouveaux, sur une terre nouvelle, commencera le règne sans fin de l’élu, règne de justice, de fidélité et de paix, véritable règne de Dieu, dans lequel Israël sera le peuple roi.
[31] Un bûcher commun, dit Lcain, attend le monde, il mêlera les ossements des hommes aux débris des étoiles. « Communis mundo superest rogus, ossibus astra mixturus. » (Phars. xxiii.)
Ovide nous représente Jupiter sur le point de foudroyer la terre, et s’arrêtant tout à coup, car, dit il : Les arrêts du destin lui arrivent à la mémoire, il se rappelle qu’un jour la mer, la terre et le palais même du ciel, saisis par la flamme, s’embraseront, et la machine du monde, fabriquée avec tant d’art, sera détraquée.
Ecce quoque in fatis reminiscitur adfore tempus
Quo marc, quo tellus, corruptaque regia cœli
Ardeat, et mundi moles operosa laboret. (Metam, i, 350).
(Voir sur cette tradition et ces diverses citations, le travail du R.P. de Bouniol. Études religieuses, livraison nov. 1879.)
[32] 1 Cette combustion du monde est un fait commencé, et que les astronomes ont observé. Le P. Secchi parle d’une étoile qui passa en douze jours de la deuxième à la sixième grandeur. Son spectre fut étudié. A ses raies très bril¬lantes on constata qu’elle passait par toutes les phases de l’incandescence et était en proie à un vaste incendie. La même observation a été faite sur d’autres étoiles qui en peu de jours se sont éteintes et ont complètement disparu.
[33] 1 Gen., 1, 2.
[34] 2 Les plus savants astronomes de notre siècle, Janssen, Secchi, Angstrœm, ont établi par des études et des observations incontestables, et en décomposant la lumière stellaire, l’existence des eaux supérieures dans les régions du firma¬ment, c’est à dire autour du soleil, dans les planètes, et jusque dans les étoiles les plus éloignées. Le 12 mai 1869, Janssen écrivait de l’Himalaya à l’Académie des sciences de Paris : « Certaines conjectures théoriques me portèrent à chercher si la lumière spectrale de certaines étoiles ne présenterait pas les caractères optiques de la vapeur d’eau. Le fait a vérifié mes prévisions ; on ne peut plus mettre en doute aujourd’hui qu’un grand nombre d’étoiles ne soient enveloppées d’une atmosphère aqueuse. Le soleil lui même présente des taches et des rides qui sont dues à la vapeur d’eau. » Telles sont les eaux supérieures dont parle la Bible. Ainsi la vraie science a t elle confondu la science hostile et incrédule qui se raillait de Moine, et s’inscrivait en faux contre nos Livres saints.
[35] 1 1 Gen., 17.
[36] 1 Ps. xxxiii, 6.
[37] 2 Ps. xcvi, 3, 4.
[38] D’après les textes de l’Évangile qui nous disent nettement que les vertus des cieux seront ébranlées : Virtutes Dei commovebuntur, que les étoiles du Ciel tomberont, il faut forcément admettre que ce ne sera pas seulement notre terre, mais les étoiles ou tout au moins la totalité de notre système planétaire qui seront dissous, désorganisés, mis en conflagration. L’astronome Lagrange, dans son traité du mécanisme céleste et dans sa théorie sur la variation des planètes et le déplacement de l’axe de leur orbite, en déduit la conclusion, que notre système planétaire est à l’abri de tout écroulement, et qu’il est constitué de manière à pouvoir durer des milliards de siècles. La théorie de Lagrange est sans doute très ingénieuse et très belle, mais elle est fondée sur cette hypothèse, qu’aucune caus2 étrangère et imprévue ne surviendra pour changer l’ordre actuel et infliger un démenti aux calculs rigoureux de la science. Or, celui qui a créé les cieux et dirigé leurs mouvements avec une harmonie et un ordre si parfaits et si admirables, peut en un instant et sans miracle aucun défaire son œuvre. Par une cause secrète, inconnue à l’homme, il peut produire dans les mouvements célestes, un trouble, une altération, qui instantanément le bou¬leverseront de fond en comble, et qui neutraliseront et suspendront dans les planètes et la marche de leurs satellites, les forces et les lois d’attraction que nos savants réputent invariables et éternelles. Nous savons que ces choses auront lieu, puisque la Vérité éternelle nous a formellement prédit pour la fin des temps la ruine et la désorganisation des cieux. Et cette ruine est certaine, puisqu’il est écrit : Cœli et terra transibunt, verba autem mea non prœteribunt.
Comme disent les Italiens : Scillaba di Dio non si Cancella. Ainsi la fin du monde sera un fait surnaturel, parce qu’elle est, quant à l’époque, du domaine exclusif de la volonté de Dieu, et quant au mode elle sera un fait de l’ordre naturel, parce que Dieu, pour l’opérer, se servira des causes secondes et natu¬relles.
[39] 1 Mille anni, ante oculos tuos, tanquam dies hesterna quæ præteriit. (Ps.lxxxix, 4.)
[40] Mgr Gaume, Où allons nous ? no xvii.
[41] Saint Jérôme, iie lettre à Agéruchie de Monogam.
[42] Joan., v, 27.
[43] Rom., c. III, 8.