L’humilité, partie 2 (ASDE 11)

 

L’Humilité (suite)

De saint Josemaria Escriva

Extraits du 1er livre posthume

Amis de Dieu (suite)

 

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Cette façon d’agir de Jésus ne vous enivre-t-elle pas d’amour ? Il leur apprend la doctrine et, pour qu’ils la comprennent, Il leur donne un exemple vivant. Il appelle un enfant, un de ceux qui devaient être en train de courir dans cette maison, et Il le serre contre son Cœur. Quel silence éloquent que celui de Notre Seigneur ! Il a déjà tout dit : Il aime ceux qui se font comme des enfants, Il ajoute ensuite que le résultat de cette simplicité, de cette humilité d’esprit consiste à pouvoir L’embrasser, Lui et le Père qui est aux Cieux.

 

Lorsque le moment de sa Passion approche et que Jésus veut montrer sa royauté de façon imagée, Il entre triomphalement à Jérusalem, monte sur un âne ! Il était écrit que le Messie devait être roi d’humilité : Pousse des cris de joie fille de Jérusalem ! Voici que ton roi vient à toi : Il est juste et victorieux, humble et monté sur un âne, petit d’une ânesse.

 

Maintenant, pendant la Dernière Cène, le Christ a tout préparé pour se séparer de ses disciples, alors qu’eux se sont embarqués dans une énième discussion pour savoir qui de ce groupe choisi serait considérer comme le plus grand. Jésus se lève de la table, quitte son manteau et, prenant un linge, Il s’en ceignit. Puis Il verse de l’eau dans un bassin et Il se mit à laver les pieds des disciples et à les essuyer avec le linge dont Il était ceint.

 

Il a de nouveau prêché par l’exemple, par les œuvres. Devant ses disciples qui discutaient pour des raisons d’orgueil et de vanité, Jésus se baisse et remplit avec plaisir la fonction de serviteur. Puis, une fois revenu à table Il commente : Comprenez-vous ce que je vous ai fait ? Vous m’appelez Maître et Seigneur et vous dites bien car je le suis. Si donc je vous ai lavé les pieds, Moi le Seigneur et le Maître, vous aussi vous devez vous laver les pieds les uns aux autres. Personnellement cette délicatesse de notre Christ m’émeut. Parce qu’Il n’affirme pas : si je m’occupe de cela que ne devrez-vous pas faire de plus ? Il se met au même niveau, Il n’oblige pas par la force: il censure affectueusement le manque de générosité de ces hommes.

Comme aux douze premiers disciples, le Seigneur peut nous suggérer quelque chose, et Il le fait continuellement : exemplum dedi vobis, Je vous ai donné un exemple d’humilité. Je me suis transformé en esclave, pour que vous sachiez, avec un cœur doux et humble, servir tous les hommes.

 

Plus tu es grand, plus il faut t’abaisser pour trouver grâce devant le Seigneur. Si nous sommes humbles, Dieu ne nous abandonnera jamais. Il humilie l’arrogance de l’orgueilleux mais sauve les humbles. Il délivre l’innocent qui sera sauve a cause de la pureté de ses mains. La miséricorde infinie du Seigneur ne tarde pas à venir en aide à celui qui L’appelle du fond de son humilité. Et Il agit alors comme la personne qu’Il est : comme Dieu Tout-Puissant. Bien qu’il y ait de nombreux dangers, bien que l’âme paraisse traquée, bien qu’elle se trouve entourée de toutes parts par les ennemis de son salut, elle ne périra pas. Et ce n’est pas seulement une tradition du temps passé : cela continue de se produire de nos jours.

 

En lisant l’épître d’aujourd’hui, je voyais Daniel au milieu des lions affamés et sans pessimisme je ne puis dire que n’importe quelle époque passée a été meilleure, car toutes les époques ont été bonnes et mauvaises je pensais que, par les temps qui courent, il y a beaucoup de lions en liberté, et que nous devons vivre dans ce milieu. Des lions qui cherchent qui dévorer : tamquam leo rugiens circuit, quaerens quem devoret.

 

Comment éviterons-nous ces fauves ? Peut-être ne nous arrivera-t-il pas la même chose qu’à Daniel. je ne suis pas enclin à voir des miracles partout, mais j’aime cette magnificence de Dieu et je comprends qu’il Lui eût été plus facile d’apaiser la faim du prophète ou de déposer un plat devant lui; or Il ne le fit pas. Il ordonna, en revanche, à un autre prophète, Habaquq, de se déplacer miraculeusement de la Judée pour lui apporter de la nourriture. Il n’hésita pas à réaliser un grand prodige, parce que Daniel ne se trouvait pas dans cette fosse par hasard mais par l’injustice des suppôts du diable, pour le fait d’être serviteur de Dieu et destructeur d’idoles.

Quant à nous, sans prodiges spectaculaires, avec la normalité d’une vie chrétienne ordinaire, par des semailles de paix et de joie, nous devons détruire également beaucoup d’idoles : celle de l’incompréhension, celle de l’injustice, celle de l’ignorance, celle de la prétendue suffisance humaine qui tourne le dos à Dieu avec arrogance.

N’ayez pas peur, ne craignez aucun mal, même si les circonstances dans lesquelles vous travaillez sont terribles, pires que celles de Daniel dans la fosse avec ces animaux voraces. Les mains de Dieu sont aussi puissantes et, si besoin était, elles feraient des merveilles. Fidèles ! Avec une fidélité aimante, consciente, joyeuse, à la doctrine du Christ, persuadés que les années actuelles ne sont pas pires que celles d’autres siècles et que le Seigneur est toujours le même.

 

J’ai connu un vieux prêtre qui affirmait de lui-même en souriant: je suis toujours tranquille, tranquille. Nous devons nous trouver toujours ainsi, au beau milieu du monde, entourés de lions affames, mais sans perdre la paix: tranquilles. Avec amour, avec foi, avec espérance, sans oublier jamais que, s’il le faut, le Seigneur multipliera les miracles.

 

Je vous rappelle que, si vous êtes sincères, si vous vous montrez tels que vous êtes, si vous vous divinisez, à force d’humilité et non d’orgueil, nous nous sentirons sûrs, vous et moi, dans n’importe quel milieu, nous pourrons toujours parler de victoires et nous aurons droit au nom de vainqueurs. Grâce à ces victoires intimes de l’amour de Dieu, qui apportent la sérénité, le bonheur de l’âme, la compréhension.

 

L’humilité nous poussera à mener à bien de grandes entreprises ; mais à la condition que nous ne perdions pas de vue la conscience de notre petitesse, avec une conviction chaque jour plus grande de notre pauvre indigence. Reconnais sans hésitations que tu es un serviteur obligé a rendre un grand nombre de services. Ne te pavane pas d’être appelé fils de Dieu reconnaissons la grâce, mais n’oublions pas notre nature — ; ne t’enorgueillis pas si tu as bien servi parce que tu as accompli ce que tu avais à faire. Le soleil réalise sa tâche, la lune obéit ; les anges remplissent leur mission. L’instrument choisi par le Seigneur pour les gentils dit : je ne mérite pas le nom d’Apôtre parce que j’ai persécuté l’Eglise de Dieu (I Cor XV, 9) … Nous non plus nous ne prétendons pas que l’on nous loue pour nous-mêmes : c’est-à-dire pour nos mérites, toujours mesquins.

De l’homme perfide et pervers, Dieu, délivre-moi. Le texte de la Messe nous parle à nouveau de bonne divinisation : il fait ressortir à nos yeux la mauvaise pâte dont nous sommes faits, avec tous ses mauvais penchants ; et il supplie ensuite, emitte lucem tuam, envoie ta lumière et ta vérité, qui m’ont guidé et m’ont conduit à ta montagne sainte. Il m’importe peu de vous raconter que je me suis ému à la lecture de ces mots du graduel.

 

Comment devons-nous nous comporter pour acquérir cette bonne divinisation ? Nous lisons dans l’Evangile que Jésus ne pouvait pas circuler en Judée parce que les Juifs voulaient Le tuer. Lui qui, par sa simple volonté, pouvait éliminer ses ennemis met aussi en œuvre les moyens humains. Lui qui était Dieu, et à qui une décision personnelle suffisait pour changer les circonstances, nous a laissé une leçon pleine de saveur : Il ne se rendit pas en Judée. Ses frères Lui dirent donc : “ Passe d’ici en Judée afin que tes disciples aussi voient les œuvres que Tu fais. ‘’ Ils prétendaient lui faire faire un « numéro ». Le voyez-vous ? Et voyez-vous ce qu’est une leçon de bonne divinisation et de mauvaise divinisation ?

 

Bonne divinisation : En Toi se confient — chante l’offertoire — ceux qui connaissent ton nom, Tu n’abandonnes pas ceux qui Te cherchent, Yahvé. Et c’est la joie de cette poterie d’argile pleine d’agrafes — car Il n’oublie pas le cri des malheureux —, la joie des humbles.

 

Ne prêtez aucune foi a ceux qui présentent la vertu de l’humilité comme de la timidité humaine ou comme une condamnation perpétuelle à la tristesse. Se sentir argile, réparé avec des agrafes, est une source continuelle de joie ; cela signifie nous reconnaître peu de chose devant Dieu : enfant, fils. Et, quand on se sait pauvre et faible, y a-t-il plus grande joie que celle de se savoir aussi fils de Dieu ? Pourquoi les hommes s’attristent-ils ? Parce que la vie sur la terre ne se déroule pas comme nous l’espérons personnellement, parce que des obstacles se dressent, nous empêchant ou nous rendant plus difficile de continuer à satisfaire ce a quoi nous prétendons.

Il ne se produit rien de tout cela quand l’âme vit la réalité surnaturelle de sa filiation divine, Si Dieu est pour nous, qui sera contre nous ? je le répète depuis longtemps, la tristesse est le lot de ceux qui s’acharnent à ne pas reconnaître qu’ils sont fils de Dieu.

Pour terminer, nous découvrons dans la liturgie d’aujourd’hui deux demandes qui doivent jaillir comme une flèche de notre bouche et de notre cœur : Dieu Tout-Puissant, fais qu’en accomplissant toujours ces mystères divins nous méritions de nous approcher des dons célestes. Et donne-nous, Seigneur, nous T’en supplions, de Te servir constamment selon Ta volonté. Servir, servir, mes fils, c’est ce qui nous revient ; être des serviteurs de tout le monde, pour que, aux temps où nous vivons, le peuple fidèle augmente en vertu et en nombre.

 

Regardez Marie. Aucune créature ne s’est jamais abandonnée avec plus d’humilité aux desseins de Dieu. L’humilité de l’ancilla Domini, de la servante du Seigneur, est la raison pour laquelle nous l’invoquons comme causa nostrae laetitiae, cause de notre noie. Eve, après avoir commis le péché insensé de vouloir s’égaler à Dieu, se cachait du Seigneur tout honteuse : elle était triste. Marie, parce qu’elle s’avoue la servante du Seigneur, devient Mère du Verbe divin et se remplit de joie. Que son allégresse de bonne Mère se communique à nous tous : imitons totalement Sainte Marie en cela, pour ainsi ressembler davantage au Christ.

 

 

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